Saviez-vous que de nombreuses inventions ont été découvertes par erreur ? Les cookies, les chips, les post-it et les rayons X sont autant d’exemples d’erreurs devenues des réussites nous rappelant que l’erreur est humaine !
Mais si l’erreur est considérée par les philosophes anciens comme le propre de l’Humanité, peu de place lui est malheureusement encore accordée aujourd’hui dans notre société. Dans une course effrénée vers les résultats, nous en oublions parfois que se tromper permet d’apprendre. Les erreurs, encore trop souvent soulignées au bic rouge dans le cadre scolaire, sont bel et bien indispensables aux apprentissages et au développement de l’enfant.
En effet, la science a prouvé que le cerveau apprend en se trompant. Le cerveau humain prédit, constate et s’adapte continuellement en fonction des expériences faites par l’enfant. Au quotidien, l’enfant se trompe, recommence, persiste. Puis, un jour, il réussit. Il a alors intégré l’apprentissage. Les enfants ont donc besoin d’expérimenter pour devenir des experts dans la fonction qu’ils sont en train d’acquérir.
Pourquoi est-il intéressant de laisser un enfant se tromper pour son développement cognitif ?
« L’erreur est le témoin des processus intellectuels en cours, comme le signal de ce à quoi s’affronte la pensée de l’enfant aux prises avec la résolution d’un problème » (J.P Astolfi).
L’erreur permet au cerveau de s’adapter et de se réajuster. Grace aux expériences faites par l’enfant, des tentatives et des essais vont se connecter entre eux pour former des synapses et permettre l’échange d’informations au sein de leur corps. Les synapses vont ensuite permettre l’apprentissage et l’usage de toutes les fonctions nécessaires au développement. L’expérimentation réussie ou erronée va donc permettre le développement et la consolidation des synapses dans le cerveau de l’enfant. Il est essentiel pour le jeune enfant de tester, de toucher et de se tromper. Une erreur dans la réalisation d’une tâche va permettre à l’enfant de réajuster sa manière de faire et de finalement trouver une solution. D’un point de vue cognitif, l’erreur facilitera l’évaluation d’une performance, d’un écart au but ou encore aidera à la réalisation d’une tâche et au développement des connaissances. L’enfant se construit en expérimentant et en testant ses capacités.
Pourquoi est-il intéressant de laisser un enfant se tromper pour son développement psychoaffectif ?
L’enfant va comprendre et apprendre que face à une difficulté, il est en mesure de trouver des solutions de manière autonome et que la plupart des erreurs peuvent être corrigée. L’enfant sera alors plus enclin à tester de nouvelles expérimentations. Il va s’ouvrir et être curieux. Il n’aura pas de crainte à apprendre de nouvelles pratiques, il pourra faire des choix en confiance, en sachant qu’il pourra toujours réajuster sa posture si cela ne convient pas. L’enfant a besoin de comprendre que les erreurs sont nécessaires, elles l’aident à mieux prendre conscience de ses forces et de ses difficultés et lui permettent de faire appel à ses propres ressources pour s’adapter à différentes situations. En envisageant l’erreur non pas comme un échec mais plutôt de manière positive, nous donnons toutes les bases nécessaires à l’enfant pour qu’il puisse développer sa confiance en soi et l’encourager au dépassement de soi. N’oublions pas non plus que nous sommes les premiers modèles de nos enfants et que le rapport que nous entretenons avec nos échecs et ce que nous en faisons participe également à la valence émotionnelle que l’enfant donnera à ses propres échecs.
Quel regard portons-nous sur l’erreur au sein du 213 Centre thérapeutique ?
Les patients rencontrés au 213 arrivent souvent à nos consultations avec l’idée reçue que « l’erreur » est équivalent à « l’échec » et parfois même qu’elle signifie qu’ils sont porteurs d’un trouble ou d’une pathologie. Leur estime d’eux-mêmes est très souvent touchée face aux erreurs commises dans le cadre scolaire ou face aux apprentissages. S’il est vrai que certaines erreurs ou contextes dans lequel elles sont produites peuvent être des signes cliniques d’un trouble cognitif, rappelons, nous l’avons vu plus haut, que se tromper et faire des erreurs, est humain et permet d’apprendre. Un enfant peut tout à fait faire des erreurs dans ses apprentissages sans pour autant présenter une pathologie clinique.
Il est d’ailleurs intéressant d’observer le type d’erreur que l’enfant ou l’adolescent va commettre en consultation. Est-ce qu’il s’agit d’erreurs d’inattention ? D’une erreur de compréhension de la consigne ? D’une erreur de compréhension de la matière ? D’une erreur liée à une émotion ?
Nous observerons également ce qui aide l’enfant face à l’erreur et s’il arrive à la dépasser avec différents supports (évaluation dynamique). Il est également important pour nous d’évaluer si l’enfant a conscience de ses erreurs, s’il s’en rend compte, s’il est capable de s’auto-corriger ou de se corriger si l’erreur commise est soulignée. Un enfant capable de se corriger a peut-être simplement été trop vite ou s’est montré anxieux face à la tâche proposée.
Nous sommes également soucieuses du rapport que l’enfant entretient face à l’erreur. Bien souvent, l’erreur est ressentie comme un événement négatif. En effet, comme toute prise de décision implique un choix au risque de se tromper, la peur de faire une erreur peut donc engendrer une absence d’audace ou de décision. Si elle est assimilée à un échec général personnel, elle conduira parfois les enfants et les adolescents à une peur de commettre des erreurs qui peut devenir pathologique. Si d’un point de vue rationnel, il serait parfaitement logique et productif d’accepter d’apprendre de ses erreurs, il existe cependant des biais psychologiques et des facteurs culturels qui nous en empêchent.
Après tout cela, n’avez-vous pas envie d’apprendre à porter un autre regard sur vos propres erreurs et celles faites par vos enfants ? Rappelons-nous que l’erreur laisse aussi la place à l’inattendu, à la surprise et à la créativité !
Zoé Campus
Psychologue clinicienne ~ Thérapeute du développement ~ Thérapeute par le Jeu et la Créativité
De plus en plus, on entend parler des thérapies EMDR mais de quoi s’agit-il exactement ?
L’EMDR est l’acronyme de Eye Movement Desensitization and Reprocessing (désensibilisation et reprogrammation par des mouvements oculaires). Cette approche thérapeutique a été développée par Francine Shapiro, psychologue américaine en 1979. Cette méthode se base sur les balayements oculaires pour agir sur des souvenirs non traités qui sont stockés au niveau cérébral et qui influencent nos pensées, nos émotions et nos comportements. Ceux-ci réactivent des zones cérébrales liées aux sensations de peurs et de dangers.
Comment ça marche ?
De manière générale, lorsque nous sommes confrontés à un danger. Plusieurs zones du cerveau s’activent. Tout d’abord, le thalamus bloque l’information dangereuse vers la zone préfrontale. L’amygdale, système d’alarme cérébral, active l’hippocampe qui estime si le danger est connu et inconnu et envoie ainsi l’information au tronc cérébral qui provoque les comportements de fuite, d’attaque et de figement (freeze). Ceux-ci peuvent être adaptatif ou dysfonctionnel.
Dans la thérapie EMDR, il peut s’agir soit d’événements particulièrement violents, choquants et brusques ex : un accident de voiture. Soit, par exemple, des actions répétées de rejet et de solitude dans l’enfance. Les zones cérébrales liées au danger sont alors particulièrement activées. Cela peut créer des sentiments d’angoisse et de peur face à certaines situations. Le cerveau peut être dépassé par une information traumatique qu’il n’arrive plus à gérer et qui impact les émotions, les cognitions et les comportements. Ce sont donc des souvenirs stockés, de manière dysfonctionnelle, qui sont à la base des difficultés que rencontrent la personne. Les aspects sensoriels, physiques, émotionnels, cognitifs de l’expérience traumatique sont organisés en réseaux de mémoire. Ces expériences de vie négatives engendrent des dysfonctionnements actuels qui impactent la personne de façon négative et qui peuvent être considérées comme des traumas. Ce sont ces souvenirs non traités, qui engendrent de la souffrance chez la personne. Les comportements, les croyances, les émotions et les sensations sont donc des manifestations de ces souvenirs non traités.
L’utilisation de l’EMDR va agir sur ces souvenirs non-traités. Ceux-ci constituent la cible de traitement qui représente le focus de la thérapie. Le traitement EMDR donne accès à ces réseaux dysfonctionnels et permet de retravailler ces informations pour qu’elles puissent être évoquées de manière consciente sans plus susciter de débordement émotionnel.
L’EMDR induit des mécanismes neurobiologiques qui facilitent l’activation des souvenirs non-traités et favorisent leur traitement. En effet, il s’agit de retraiter des expériences de vie négatives afin de les intégrer de façon positive et adaptative. Par la thérapie EMDR, l’information « passe » au niveau du cortex préfrontal, zone narrative, qui permet de revivre l’expérience traumatique sans activer les réseaux mnésiques dysfonctionnels et les comportements, émotions, cognitions négatives et génératrices de souffrance. Le retraitement de l’information se fait donc au niveau cérébral et permet à la personne d’intégrer des expériences passées qui peuvent être considérées comme des traumatismes.
Pour conclure
En conclusion, la thérapie par l’EMDR s’adresse donc à toutes personnes ayant subit un événement traumatique dont l’impact influence négativement, les émotions, les cognitions et les sensations. Par exemple, dans des cas de PTSD, de troubles anxieux, de phobies, etc.
Les traumas plus complexes, qui atteignent de façon ancrées l’estime de soi et les capacités relationnelles et dont l’angoisse ressurgit fréquemment de façon disproportionnée dans le quotidien, nécessitent une prise en charge plus globale. La préparation aux séances d’EMDR et la thérapie est plus longue.
L’EMDR peut donc être indiqué pour toutes situations ayant un impact traumatique sur la personne. Néanmoins, le critère principal est la stabilité du patient. En effet, les ressources de la personne et les capacités adaptatives doivent être développées avant de retraités des souvenirs traumatiques. Cette thérapie ne peut donc pas être utilisée dans des situations de maladie mentale décompensée ex : la psychose. Il est important de pouvoir travailler de façon sécure.
La médiation est un mode alternatif de résolutions des conflits. Autour de la famille, la médiation a pour objectif d’offrir un temps d’arrêt à partir de ce qui pose problème ou d’anticiper ce qui pourrait le devenir. On parle de médiation familiale dans le cadre d’une séparation, de décisions familiales importantes à prendre, d’héritage à gérer. C’est avant tout un échange humain en présence d’un tiers qui va accompagner la communication.
La médiation familiale est un espace de parole où chacune des parties (couple, famille, parents) doit pouvoir s’exprimer, dire ce qui fait blocage, engager la discussion et nommer son ressenti en toute liberté.
Qu’est-ce qu’un médiateur familial ?
Le médiateur est régulièrement défini comme un facilitateur de communication, un accompagnateur. Il « est ce tiers qui accueille, écoute, rejoint l’autre avec empathie, tout en gardant une “juste distance” de professionnel ». Il est perçu comme un récepteur de confidences, d’histoires personnelles mais aussi d’émotions. En amenant les familles à parler d’elles, le médiateur leur demande de raconter leur histoire de vie. Reprendre les bons comme les moments les plus difficiles est un processus qui permet de cheminer vers la séparation, vers le deuil de la relation. Évoquer ensemble ce qui a pu amener au conflit permet de mettre des mots sur ce qui est vécu par l’autre.
Le médiateur est ce professionnel qui, à un moment dans la crise, va amener les parties vers un changement, selon leur volonté et leur rythme. Il va profiter de ce bouleversement, partir de leurs besoins et avancer vers des pistes de solutions. Il devra faire face à des sentiments ambivalents dus à la séparation et à des tensions très fortes. En effectuant un travail de reconnaissance autour de la souffrance de chacun, il offre la possibilité et la place aux émotions de s’exprimer.
Pourquoi parler d’émotions en médiation ?
« […] L’espace de médiation est un lieu où les émotions sont omniprésentes. Le rôle du médiateur est de mesurer la capacité de chacun à y être confronté et à pouvoir les verbaliser, notamment dans le contexte particulier que représente la mise en présence avec l’autre partie »[1]. Il y des situations où le partage d’émotion avec un tiers va être positif dans le processus de séparation. D’autres où il est impossible de le faire car les parties sont trop enlisées dans le conflit. Le médiateur doit pouvoir vérifier la disponibilité de chacun à recevoir et entendre les émotions de l’autre. Il est garant d’un cadre sécurisant pour chacun et ne doit en aucun cas imposer à l’un les émotions de l’autre. En offrant cette espace de parole autour des émotions, le médiateur vérifie que chacun a pu s’exprimer librement et à sa bonne convenance.
On pourrait définir le médiateur comme un porteur d’émotions. Comme un mineur[2] qui explore et creuse les histoires de vie, qui offre aux parties la possibilité de les éclairer et d’en saisir les opportunités. Il doit être attentif au moment où il est utile d’épingler ces émotions et de permettre aux familles de les déployer. Les émotions doivent apporter un sens à la médiation et venir alimenter le processus. Le médiateur doit en prendre acte avec l’idée qu’elles vont venir aider la démarche. Le processus de médiation va alors permettre aux médiés d’en faire quelque chose pour continuer leur cheminement dans leur processus de deuil ou vers l’acceptation de la séparation.
Les émotions se jouent dans la relation à l’autre ou à soi-même. Une émotion se vit au niveau individuel, c’est de l’ordre de l’intime, de l’hyper-personnel. On ressent rarement la même émotion que l’autre en même temps et avec la même intensité. Imaginez quand on se sépare ou quand on est en conflit dans une famille, les émotions se confrontent et s’amplifient. La séparation vient toucher à quelque chose d’existentiel, de vital et de quotidien. Bien sûr elle vient augmenter l’intensité de tous les ressentis. On parle, dans ce cas-ci, des émotions présentes autour du motif de la rupture, pendant la rupture et lors du prononcé de la rupture mais aussi à cause de la conflictualité après la rupture.
Quels types d’émotions en médiation ?
Dans le processus de rupture, il y a souvent une asynchronie[3] : l’un avance plus rapidement que l’autre. Il est rare que les membres d’un couple prennent la décision de se séparer en même temps avec la même conviction. Cette différence de rythme joue sur l’intensité des émotions et renforce les sentiments de solitude et d’individualité. « Je vis quelque chose tout seul concernant quelque chose qui nous appartient à deux : notre couple ». Les émotions qui sont liées à la séparation sont nombreuses : l’ennui, la confusion, la colère, la peur, l’anxiété, le regret, la tristesse, le désespoir, la frustration, la culpabilité, l’insuffisance, l’indécision ou la désorganisation. On peut aussi parler de sentiment, de stress, d’impatience, d’incompréhension, d’exaltation, de trahison, de perte ou de détachement.
L’émotion qui prédomine le plus souvent est la peur face au changement, à l’inconnu. Tous les médiés peuvent donner à un moment ou à un autre accès à leurs peurs durant le processus de médiation, qu’elles soient rationnelles ou irrationnelles, individuelles ou familiales. « La peur est une émotion liée au futur »[4], qui agit sur notre confiance et notre estime de soi. Elle crée de l’appréhension face à la nouveauté et l’inconnu. La peur peut être vécue par les deux : celui qui quitte et celui qui est quitté. On parle de peur du lendemain, des conséquences et des responsabilités à prendre. Mais aussi peur de l’autre, d’être lâché, de la solitude ou de la vengeance. Elle se manifeste généralement par de la panique, de l’anxiété, de l’angoisse et un sentiment d’insécurité.
Les émotions sont des étiquettes qu’on colle facilement sur tel ou tel type de personnalité. Le médiateur, dans son travail d’accompagnement autour du conflit, se doit d’être ouvert et tolérant à tout type d’émotions. Les émotions peuvent varier selon le motif du conflit, les personnalités des médiés mais également selon les genres. Elles sont habituellement attribuées selon un code social défini depuis des années et difficile à bousculer. Par exemple, « génétiquement ou pas, la joie et la colère sont des monopoles masculins interdits aux femmes, et la tristesse et la peur des monopoles féminins inaccessibles aux hommes »[5]. Cette répartition « archaïque » des émotions incite encore aujourd’hui certaines personnes à ne pas exprimer leurs émotions car elles pensent ne pas leur appartenir, ne pas être légitime de les ressentir. En médiation, on doit pouvoir faire de la place à toutes les émotions, diverses et variées, tant qu’elles sont énoncées et travaillées dans le respect de l’autre.
Comment les émotions s’expriment-elles en médiation ?
L’expression des émotions face à l’autre doit résulter d’un besoin, d’une demande, d’un enjeu. C’est au médiateur de le percevoir en récoltant des informations sur les attentes des parties au fil des discussions. Les entretiens sont en effet une occasion pour les médiés de dire des choses qu’ils ne se sont jamais dites et d’avoir accès à ce que l’autre vit. « Le médiateur réalise que la racine de presque tous les conflits est un blocage émotionnel qui empêche de voir le conflit de façon objective »[6]. L’intérêt pour le médié est de pouvoir comprendre comment l’autre a vécu la séparation, comment les choses se sont passées pour lui. Cela permet aussi de parler des moments positifs qui ont existé dans la relation et de ne pas rester bloqués sur les difficultés actuelles. Conscient de ce qui se joue au gré de leurs interactions, le couple va ainsi clôturer son histoire en écrivant la dernière page du livre ensemble et en se séparant proprement[7]. La bienveillance et la réciprocité sont de mise pendant tout le processus. Quand le travail collectif sur les émotions est possible, ouvrir la discussion au vécu et à l’intime peut faire avancer les choses et lancer le processus de deuil. Même si dans certaines situations l’expression des émotions ne va pas apaiser les deux membres du couple dans l’acceptation de la séparation, le fait que l’un des deux en tire des bénéfices pendant que l’autre reste dans une position plus passive est déjà positif.
L’expression des émotions peut avoir lieu à différents moments dans le processus de médiation. Les émotions peuvent être présentes lors des échanges verbaux, dans le non-verbal ou dans le silence. Elles sont inévitables dans le conflit mais peuvent toutefois évoluer durant le processus de médiation. On peut démarrer avec des émotions à connotation négative (tristesse, colère, peur) et en fin de médiation repartir avec des émotions plutôt positives telles que la joie, le soulagement ou la confiance restaurée.
Quelle place aux émotions en médiation au 213 Centre thérapeutique ?
Pour conclure, la gestion des émotions en médiation est plurielle. Le médiateur doit faire preuve de souplesse en toute situation. Son cadre ne peut être rigide et sa façon d’aborder les émotions doit pouvoir s’adapter à la demande des parties. Il y a des médiations où les émotions peuvent rester en retrait et être accueillies subtilement par le médiateur. D’autres, où on ne peut pas faire l’impasse car les enjeux autour du conflit sont emprunts d’émotions.
Tel un caméléon, il doit pouvoir s’adapter à chaque situation : être celui qui induit l’émotion, qui l’encourage à s’exprimer, qui la provoque avec respect et délicatesse, qui fait émerger des émotions enfouies. Le médiateur effectue un travail d’équilibriste car il doit trouver le juste milieu entre ce que les médiés lui livrent spontanément et ce qu’il peut encourager à révéler.
Il faut un juste dosage entre le travail des émotions perçues, le projet autour de celles que l’on souhaite percer pour le processus de médiation à des fins utiles et le respect de celles qui resteront enfuies à la demande des parties.
Au 213 Centre thérapeutique, la médiatrice familiale peut vous accompagner autour d’une séparation, d’une rupture de contact, d’un conflit majeur ou d’un questionnement dans sa coparentalité. La pluridisciplinarité de l’équipe du centre permet également d’offrir aux enfants un espace de paroles où se déposer quand la séparation de leurs parents fait souffrance ou quand un temps d’arrêt s’impose autour de ce changement.
[1] GRECHEZ Jean, « Enjeux et limites de la médiation familiale », Dialogue, Recherche cliniques et sociologiques sur le couple et la famille, 2005, p 41
[2] PHILIPPART Nathalie, « Les émotions en médiation, entre souffles créatifs et élan audacieux », L’observatoire, Créateur d’échanges et de transversalité dans le Social, a.s.b.l. Trimestriel. N°102/2020 « Les émotions dans le travail social, frein ou tremplin ? », p 49-53
[3] VAN HEMELRIJCK Jean, « la malséparation – Pourquoi on n’est pas séparé alors qu’on n’est plus ensemble», Payotpsy, 2016
La dysrégulation émotionnelle est souvent associée au TDAH et a d’ailleurs été reconnue dans le DSM-5 (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) comme un élément soutenant le diagnostic. En effet, de nombreuses études montrent que les symptômes de labilité émotionnelle sont plus souvent présents chez les personnes présentant un TDAH que chez les personnes qui n’en présentent pas. Rappelons que le TDAH est un trouble neurodéveloppemental caractérisé par de l’inattention, de l’hyperactivité et de l’impulsivité. Pour en savoir plus sur le TDAH, nous vous invitons à lire l’article « Suspicion du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité – TDA/H, illustration de la pluridisciplinarité au 213 ».
La dysrégulation émotionnelle fait référence à une déficience de la régulation des émotions et reflète des changements émotionnels rapides, excessifs et mal contrôlés en réponse à des événements ou à des interactions avec d’autres personnes et qui reviennent généralement à la ligne de base en peu de temps. Cette dysrégulation émotionnelle se manifeste par une irritabilité accrue, une faible tolérance à la frustration, une agressivité réactionnelle et de soudaines crises de colère.
Au contraire, la régulation émotionnelle peut être définie comme l’ensemble des processus par lesquels un individu évalue, inhibe, maintient ou modifie l’intensité, la fréquence ou la durée de ses réactions émotionnelles afin de présenter un comportement socialement adapté ou afin d’atteindre des objectifs qu’il s’est fixé.
Selon la théorie de Barkley qui est une référence dans ce domaine, le TDAH est caractérisé par des déficits des fonctions exécutives. Les fonctions exécutives sont des fonctions cognitives qui permettent le contrôle de l’information et du comportement grâce notamment à l’inhibition des réponses et des comportements inadaptés. Selon le modèle de Barkley le déficit du contrôle émotionnel observé dans la dysrégulation émotionnelle serait directement lié aux déficits des fonctions exécutives évoqués ci-dessus.
Toutefois ce modèle est actuellement remis en question. En effet une équipe de chercheurs a rapporté les résultats d’études récentes de neuroimagerie. Celles-ci ont montré, aux côtés des atteintes des voies fronto-corticales impliquées dans les déficits des fonctions exécutives, la présence d’altérations fonctionnelles des voies fronto-limbiques impliquées dans la régulation émotionnelle chez des patients présentant un TDAH. Ces données nous éloignent d’une conception purement cognitive du trouble. Ainsi la dysrégulation émotionnelle ne serait pas seulement une conséquence secondaire des déficits des fonctions exécutives mais elle serait une composante indépendante du trouble, contribuant ainsi à sa symptomatologie. Les auteurs soulignent par ailleurs que selon la théorie de Barkley l’intensité avec laquelle un individu montre un déficit d’inhibition comportemental est la même intensité de son déficit d’inhibition émotionnelle. Or tous les sujets présentant un TDAH ne présentent pas des symptômes de labilité émotionnelle.
Ces résultats ont toute leur importance dans la pratique clinique. En effet au sein du 213, nous tenons compte de la possible présence de difficultés émotionnelles associées au TDAH. Nous sommes attentifs également à identifier comment celles-ci contribuent aux difficultés rencontrées par nos patients afin de choisir des stratégies thérapeutiques pertinentes.
Chez le jeune enfant par exemple les manifestations de la dysrégulation émotionnelle sont en général librement exprimées. Celles-ci sont souvent mal comprises par l’entourage et mal gérées. Elles peuvent par ailleurs provoquer un rejet par l’entourage. En grandissant l’enfant peut être tenté de refouler ses émotions ou de les réprimer prenant ainsi le risque de développer une mauvaise image de soi voire un trouble anxieux. D’un autre côté, s’il ne peut contenir ces manifestations émotionnelles, cela peut potentiellement dériver en un trouble plus grave.
Une partie du travail d’accompagnement au sein du 213 consiste à expliquer au patient et à son entourage son fonctionnement, l’impact du TDAH et de la dysrégulation émotionnelle sur son comportement afin qu’il puisse en avoir une meilleure compréhension. L’accompagnement consiste aussi à soutenir l’entourage et l’enfant/l’adolescent pour qu’ils puissent développer des stratégies permettant un mieux-être au quotidien. Selon l’âge de l’enfant on peut travailler avec lui et lui apprendre à comprendre ses émotions et à les accueillir. Cet accompagnement peut à la fois être proposé par les neuropsychologues du 213 et/ou être soutenu ou complété par le regard des psychologues et psychothérapeutes du 213.
– Villemonteix, T., Purper-Ouakil, D., Romo, L., (2015). La dysrégulation émotionnelle est-elle une des composantes du trouble déficit d’attention/hyperactivité ? L’Encéphale, Volume 41, Issue 2, pp. 108-114
Être frère ou sœur d’une personne en situation de handicap peut entrainer des questions ou des remaniements au niveau émotionnel individuel voire familial. Il nous arrive, comme thérapeutes au 213 d’entamer des suivis individuels pour l’enfant en situation de handicap mais également pour l’un des membres de la fratrie.
Ayant à cœur de pouvoir soutenir leur enfant à besoins spécifiques, les parents mettent souvent toute leur énergie à entamer des suivis divers et variés pour leur enfant porteur d’un handicap. Face à cette situation, pour certains membres de la fratrie, il n’est pas toujours facile de prendre sa place, d’exister pour soi/par soi et de pouvoir partager avec aisance toutes les émotions plus au moins conscientes qui en découlent. Il est alors important pour nous de pouvoir donner une place spécifique à ces membres de la fratrie parfois mis à distance de toute proposition d’aide.
L’annonce du diagnostic
La majorité des familles s’accorde pour évoquer qu’il y a un remaniement du fonctionnement familial après l’annonce d’un diagnostic de handicap d’un enfant. Cette annonce peut entrainer des questions diverses pour chacun des membres de la famille. Elle peut aussi entrainer des messages chargés émotionnellement, liés au processus d’acceptation et de digestion de ce diagnostic.
Parfois, les mots utilisés lors de l’annonce peuvent être clairement compris du frère ou de la sœur qui, par leur maturité intellectuelle et émotionnelle sont en mesure de pouvoir comprendre la réalité qui leur est expliquée. Parfois, les mots utilisés peuvent être accompagnés d’une certaine charge émotionnelle de celui qui l’explique – d’un manque de clarté et d’accordage dans les mots utilisés – ne tenant pas compte du stade de développement du frère ou de la sœur. Cela peut alors créer des préoccupations, les informations n’étant pas suffisamment claires.
Parfois encore, il n’y a pas de mots mis sur l’annonce. Un silence pour protéger la fratrie, un silence pour protéger la famille. Un silence qui s’installe insidieusement, inconsciemment, par envie de bien faire, par manque d’outils ou encore parce que ce n’est pas le bon moment. Ces silences, à l’origine multiple et variée, peuvent protéger dans un premier temps et devenir source d’incompréhension, de souffrance face à un sujet compris par la fratrie comme étant trop complexe et devenu alors tabou. Le frère ou la soeur, peut alors, faute de réponse sécurisante satisfaisante, être traversé(e) d’émotions spécifiques et se poser des questions dont les parents n’ont bien souvent pas conscience. Ils sont alors pris par des questions parfois difficilement nommables sur : leur impression de responsabilité, les croyances et espérances de guérison, la culpabilité face au sentiment d’impuissance, les inquiétudes quant à la place dans la famille ou encore quant à la disponibilité restante des parents.
Le chamboulement émotionnel
Comme évoqué précédemment, l’annonce du diagnostic entraine un chamboulement important. Bien souvent, c’est la réaction émotionnelle des parents, plus que le diagnostic en lui-même ou la découverte du handicap, qui touche la fratrie. Incompréhension, tristesse, colère, mise à distance, grande sensibilité, optimisme, minimisation, anxiété, honte… sont autant de sentiments qui peuvent traverser l’enfant qui a le sentiment d’avoir «lui, échapper au handicap ».
Bien souvent, sentant le changement dans la famille et s’identifiant à son frère ou sa sœur en situation de handicap, l’enfant de la fratrie peut contenir ses émotions (pour ne pas surajouter à la gestion familiale) ou, à l’inverse, sortir le trop plein par des crises difficilement contrôlables, comme un indicateur du besoin d’être rassuré sur la légitimité de sa place, lui qui est en bonne santé.
En parler en famille peut s’avérer une tâche ardue où chacun, centrant son énergie à (re)trouver l’équilibre / son équilibre, n’est plus en lien de façon optimal. La complexité de toute la situation dans son ensemble, au-delà du handicap, peut rendre le dialogue difficile. Alors, certains se taisent, d’autres provoquent le dialogue par la force de leur émotion et d’autres encore arrivent à cheminer en posant quelques questions de temps à autre et parcimonieusement.
Le chamboulement des liens de famille
Quelles que soient les familles ou la position qu’on occupe dans sa fratrie, il est parfois difficile de trouver sa place. Cette question qui traverse tous les enfants peut s’avérer parfois plus délicate encore lorsqu’un frère ou une sœur est en situation de handicap.
Toutes les fratries se construisent dans la construction et la rencontre de l’altérité. Les relations fraternelles où le handicap s’invite peuvent présenter des particularités spécifiques, rendant la relation encore plus unique mais parfois également plus complexe. Nous pensons par exemple aux situations relatées par des enfants : « il/elle est dans sa bulle », « il/elle ne m’écoute pas quand je lui parle, il/elle ne sait pas se mettre à ma place », « avec lui/elle je ne sais pas jouer comme avec les copains de classes» … toutes ces phrases montrent la complexité du lien et parfois une sensation de colère/tristesse ou de manque associée. Toutes ces phrases montrent également, que très jeunes, les fratries d’enfants présentant un handicap, sont amenées à côtoyer la différence/la spécificité. Il va de soi que bien accompagné, cette découverte peut s’avérer être une richesse.
Néanmoins, il se peut aussi que l’enfant de la fratrie ait l’impression, parfois honteuse et teinté de rivalité/culpabilité, d’avoir moins d’intérêt aux yeux des parents. Il peut alors développer de façon inconsciente une rivalité non exprimée pour celui ou celle qui présente un handicap. Celui ou celle qui, par ses besoins d’attention ou de temps important, lui dérobe l’amour parental. Cela peut créer un sentiment d’injustice et de déséquilibre dans la relation familiale et parentale. L’enfant peut alors développer cette impression d’être moins aimé, mis à l’écart ou délaissé au profit de son frère ou sa sœur qui lui semble plus fragile. A l’inverse, l’enfant non porteur du handicap peut également se placer comme une aide précieuse, une ressource, presque un soignant, tant dans la fratrie que dans la famille. S’étant auto-responsabilisé ou ayant été trop rapidement responsabilisé dans le soin à l’autre, il ne peut alors expérimenter tout ressentiment parfois plus négatif, pourtant sain au bon développement de son identité différenciée. L’équilibre peut alors s’avérer précaire.
Au-delà de ces aspects spécifiques à la fratrie, il va de soi que le rythme de la famille peut être teinté par le handicap et peut laisser aux frères et sœurs une impression d’être différent dans son système familial ou encore face aux autres familles. Enfin et plus globalement, les familles, confrontées au dictat de la normalisation de notre société, se retrouvent face au regard des autres. Sentiment de différence, impression d’être jugées parfois rejetées. Sentiment qu’on réduit leur enfant au handicap, sans voir qui il est dans son entierté / son unité/ avec ses faiblesses mais aussi et surtout ses forces. Sentiment de devoir se justifier, se protéger. Autant d’éléments pouvant entrainer une cristallisation du système familial qui peut, petit à petit, se renfermer sur lui-même, n’ayant pas l’impression d’avoir une place, leur juste place.
Le travail d’établissement voire de rétablissement d’un dialogue
Les liens familiaux ne permettent pas toujours d’avoir accès au dialogue ou d’entrer dans une réflexion sur les besoins individuels de chacun. Comme expliqué précédemment, le peu de dialogue peut parfois faire émerger des souffrances. Il est alors important de penser à consulter. Les crises ou les moments de bonheurs peuvent également être des portes d’entrées pour l’instauration d’un dialogue.
Le travail auprès d’un thérapeute, permet de se déposer autour de ce qui préoccupe l’enfant de la fratrie ou la famille. Il peut être un lieu d’écoute des émotions, un lieu neutre et bienveillant d’accueil de tout ce qui se dit mais également de tout ce qu’on n’ose dire. Il peut se faire auprès d’un psychologue individuel, pour un des membres de la famille voire d’un psychologue systémicien, pour un accueil de tout le système familial.
Au même titre que d’autres difficultés déjà explorées dans ce blog, le handicap au sein d’une famille peut s’avérer être une source de changements et de remaniements de ses conceptions intimes/ famililales / relationnelles. Vivre dans une fratrie où le handicap est présent n’est pas toujours synonyme de souffrance. Au contraire, il peut aussi s’avérer être une source de richesse, de développement de son empathie, de son ouverture au monde, de ses capacités de résiliences. Néanmoins il est possible aussi que de façon plus ou moins transitoire, des difficultés apparaissent sur le plan individuel (« comment avoir ma juste place ») qu’il est important de légitimer. Enfin, légitimer chaque individu dans son système d’appartenance est un premier pas vers une société plus inclusive, chère à nos valeurs au sein du 213.
Nastassia Novis
Psychologue clinicienne ~ Thérapeute du développement
Les psychologues et thérapeutes « petite enfance » du 213 Centre thérapeutique sont constamment attentives, dans leur travail clinique, à la problématique de l’imaginaire chez l’enfant en observant la qualité de son jeu, son intérêt ou non pour ses rêves, sa façon d’habiter son corps, sa manière d’exprimer ses émotions, etc. Nous constatons malheureusement, régulièrement, chez les petits patients que nous rencontrons dans nos consultations, une difficulté d’accès à l’imaginaire. Or, cette disposition, comme nous allons le voir, est essentielle à l’équilibre psychique et somatique de tout un chacun.
On pourrait définir l’imagination comme la faculté que possède l’esprit à se représenter des images. C’est par l’imagination que les mots deviennent pour nous des choses. L’imagination est la rencontre de deux facteurs : le monde extérieur où vivent les enfants et leur monde intérieur (c’est-à-dire leur manière de voir et d’interpréter ce qui les entoure). Mais comment cela se développe-t-il chez l’enfant ? Par quelles étapes passe-t-il ? En quoi l’accès à l’imaginaire est-il si important dans le développement de l’enfant ?
Les prémisses de l’imaginaire
Dans le ventre de sa mère, le bébé a déjà un fonctionnement onirique confirmant que la relation à l’imaginaire s’établit très tôt dans le fonctionnement de l’individu. Le bébé humain nait prématurément par rapport aux autres espèces animales et a dès lors, absolument besoin de la présence d’adultes comme auxiliaires de toute une série de fonctions. Cela est évident pour ses besoins corporels (alimentation, sécurité, hygiène, santé, etc.) mais il en va de même pour la pensée. Au début, le bébé a besoin d’un autre pour penser ses propres perceptions, d’un autre qui lui prête en quelque sorte son appareil à penser les pensées ». Tout seul, il serait à nu et directement confronté au monde environnant et, de ce point de vue, la capacité de pensée intervient alors comme moyen de filtrage ou de tamisage étant entendu que l’appareil psychique ne peut travailler que sur de petites quantités d’énergie.
L’imagination ne peut surgir que dans une frustration relative, lorsqu’il y a un décalage entre le besoin et la satisfaction. L’imaginaire va ainsi se développer chez le tout-petit au travers de ce qu’on appelle une « expérience hallucinatoire ». Elle correspond à une expérience corporelle apportant de la satisfaction au nouveau-né (ex : être nourri). Après avoir vécu une expérience de satisfaction, le bébé est capable de déclencher à nouveau, psychiquement la même expérience si celle-ci s’est accompagnée de plaisir pour lui. Très tôt, le tout-petit est ainsi capable de rendre présente une situation antérieurement vécue alors que dans le même moment celle-ci n’a plus lieu dans l’espace-temps-réel. Mais pour que cela puisse se faire, il est essentiel que la personne qui s’occupe du bébé (caregiver) ne soit pas omniprésente ou anticipe tous les désirs du bébé et puisse lui faire vivre cet espace-temps entre l’appel qu’il fera et la réponse qui lui sera donnée. Car, c’est bien dans cet entre-deux, dans cet espace-temps que le bébé va imaginer sa mère (ou le caregiver) alors que réellement, elle n’est pas là. Si les besoins du bébé étaient toujours satisfaits dans l’immédiat, il ne pourrait pas mettre en place des solutions imaginaires. Combler un enfant trop rapidement revient donc à la priver de l’espace nécessaire pour expérimenter son désir et pour développer ses capacités à créer des représentations. Attention, à l’extrême inverse, l’excès de frustration peut plonger le bébé dans le désespoir et avoir un impact sur sa santé.
Espace transitionnel et objet transitionnel
Le célèbre pédiatre et psychanalyste D. W. Winnicott appelle cet espace entre le caregiver et le bébé, « l’espace transitionnel » comme étant un espace imaginaire où l’enfant serait encore en réunion avec sa mère même si celle-ci est absente. Cette aire intermédiaire est un champ d’expérience entre la réalité intérieure et la réalité extérieure.
Lorsqu’un enfant n’a pas accès à cet espace transitionnel, il pourra présenter plus tard des difficultés pour développer son monde imaginaire (penser, parler, représenter). Beaucoup de retard de langage peuvent être expliqué par une pathologie de la transitionnalité ne permettant pas à l’enfant de trouver la juste distance par rapport à son caregiver et donc d’utiliser le langage dans sa double fonction : marquer et reconnaître la séparation tout en cherchant à la combler.
C’est dans un espace potentiel que l’objet transitionnel et les phénomènes transitionnels peuvent prendre corps ; cet espace potentiel varie largement d’un individu à un autre et repose sur la confiance qu’à le bébé de son caregiver, telle qu’il l’éprouve pendant une période suffisamment longue à un moment critique de la séparation. La notion de continuité est d’ailleurs inséparable des phénomènes transitionnels.
Chaque bébé trouve ensuite sa voie, qui est unique, afin de créer sa première possession (première création dont il a besoin). Cela peut-être un objet sucé, un doigt qui caresse la lèvre supérieure, un mouvement de bouche, etc.. Avec l’objet transitionnel (« le doudou ») le bébé reste en contact permanent avec sa mère (ou son caregiver). C’est un peu « comme si », elle était là. Cet objet transitionnel ou ce doudou ne doit pas forcément être un objet au sens matériel du terme. Cela peut tout aussi bien être un mot, un air de musique, une habitude qu’il prend, etc. Quoi qu’il en soit, cet objet transitionnel est l’un des ponts qui rend possible le contact entre la psyché individuelle et la réalité externe.
L’imagination chez l’enfant de 1 à 3 ans
L’imagination repose à cet âge en grande partie sur l’imitation. Les plus petits commencent par imiter ce qui se passe autour d’eux. C’est en imitant qu’ils apprennent et développent leur imagination. Le cerveau des bébés n’a pas de notion du réel et de l’imaginaire ; ils commencent à imiter ce ce qui les entoure sous forme d’expressions ou de sons dans un premier temps (ex : un chat qui miaule). Ces interactions entre l’environnement et leurs premières imitations établissent des connexions neuronales pour la vie. Écouter de la musiquer, raconter des histoires, parler à son enfant, jouer avec lui constituent autant d’actions qui favoriseront le développement de son monde imaginaire.
Pendant les deux premières années de sa vie, les jeux d’éveil vont permettre à l’enfant d’explorer son corps et son environnement proche grâce à son activité psychomotrice (Nous vous invitons à lire l’article « Quel jeu proposer à un tout-petit de moins d’un an ? Les jouets sont-ils indispensables ? » pour plus de détails à ce sujet).
Au début de la deuxième année, la fonction symbolique se manifeste par un comportement nouveau : l’imitation différée. L’enfant est spectateur d’une scène et en garde une image mentale ; en décalé dans le temps, il reproduira de mémoire une action qu’il a vu faire. C’est à force d’évoquer des situations ordinaires auxquelles il a participé ou assisté que l’enfant de deux ans commence à s’éloigner du modèle imité pour ajouter des éléments qui témoignent de plus en plus de sa vie affective (ses désirs, ses frustrations, ses fantasmes). Ainsi, entre 18 et 24 mois, les jeux d’imitation, où le rôle de l’imaginaire est important, se mettent en place. L’enfant invente un univers parallèle dans lequel il se montre tout-puissant. Rien ne peut l’arrêter, il développe non seulement une activité motrice mais aussi une capacité psychique intense. A travers cette activité ludique, il peut parfois prendre appui sur un élément de la réalité auquel il a dû se confronter et, pour mieux le maitriser, il va le reprendre à son propre compte dans son scenario imaginaire.
Ajoutons à cela que la construction de la réalité intérieure, à travers les images, se développe avec la maturité neuronale, organisation cognitive et affectivo-émotionnelle, ainsi qu’avec des conditions adaptées aux personnes et aux milieux. Par exemple, entre un an et un an et demi l’enfant est en mesure de se souvenir d’une image. Ses représentations mentales d’un objet vont ensuite s’affiner entre 18 et 24 mois lorsqu’il élaborera des capacités de connaissances spatio-temporelles.
L’imagination chez l’enfant d’âge préscolaire
En période d’âge préscolaire, l’enfant entre dans ce qu’on appelle la période de la « pensée magique » au niveau de son développement cognitif. La pensée magique se manifeste par le fait de prêter des sentiments et des intentions aux objets comme s’ils étaient des êtres vivant. L’égocentrisme (cette difficulté jusqu’à au moins 4 ans, à se décentrer pour adopter un point de vue autre que le sien), également présent à cette période du développement est une autre composante de la pensée qui influence le contenu imaginaire.
Vers 3 ans, l’enfant va développer une véritable passion pour les figurines, les animaux en plastique de la ferme ou du zoo ou encore les personnages de ses dessins animés favoris. Formidables supports de l’imagination, ces jouets simples permettent à l’enfant de développer son langage, de mettre en scène la vie de groupe et ils deviendront des vecteurs d’échange relationnel avec les autres enfants.
Comme ils ne comprennent pas tout à cet âge, l’imaginaire des enfants se charge parfois de leur donner des réponses à des questions ou à certains phénomènes. Mais, toute invention se base d’abord sur des représentations imagées d’objets ou d’événements vécus par l’enfant lui-même.
Les jeux de rôle que l’on observe très régulièrement chez les enfants de maternelle, permettent de comprendre et de se représenter les différents états mentaux, comme les intentions ou les croyances. L’imagination joue donc un rôle très important dans la sociabilisation des enfants et dans leur rapport à l’autre.
C’est également à cet âge que de nombreux enfants s’inventent un compagnon imaginaire avec lequel ils jouent pendant des semaines, voire des mois. Ce compagnon semble avoir une vie propre. Les enfants ressentent toute une gamme d’émotions envers de tels compagnons. Les enfants sont aussi capables d’inventer des créatures imaginaires plus maléfiques. Notons que des études ont confirmé que les enfants qui avaient des amis imaginaires reconnaissaient que leurs compagnons n’étaient pas réels et qu’ils ne pouvaient pas être vus par d’autres qu’eux-mêmes. Les jeunes enfants seraient ainsi tout à fait lucides dans leur évaluation du statut ontologique des entités imaginaires – même lorsqu’il s’agit d’entités qui sont émotionnellement « chargées » telles que sorcières, monstres et compagnons imaginaires.
L’imagination chez l’enfant d’âge primaire
A cet âge, les enfants tissent plus naturellement des liens avec les autres. Ils commencent à jouer en groupe, ce qui leur permet de mettre en commun leur imagination. Fini l’imitation, ils peuvent s’affranchir du réel pour créer avec plus d’audace. C’est à cette étape de leur développement que leur imagination est la plus abstraite. En effet, à partir de 6 ans, les compétences de l’enfant sont plus grandes et la capacité créative plus structurée et définie. Ils sont capable d’imaginer sans avoir à avoir un contact avec un jouet ou une référence pour inventer et imaginer.
Vers 6-7 ans, c’est la consolidation d’images anticipées qui permettent la reconstruction de processus dynamiques et la prévision de leurs conséquences sur les actions. Nous l’avons vu, l’imagination influence le langage et la communication. Cela a également un impact sur les compétences sociales. Interagir avec les autres les aide à créer des liens d’amitié et de développement social avec leurs pairs. L’imagination influence également la résolution de problèmes : elle permet aux enfants de générer des processus de résolution et de développer des compétences pour faire face aux situations stressantes, en acquérant des moyens pour résoudre les difficultés qui surviennent.
Conclusion
Un enfant a besoin d’espace pour se construire et il n’a nul besoin d’être sollicité, voir stimulé en permanence dans l’idée qu’il faudrait qu’il acquière un maximum d’aptitudes le plus jeune possible. Au contraire, un enfant a besoin de souffler, de ne rien faire et même parfois de s’ennuyer pour trouver son propre équilibre (Nous vous invitons à ce propos à lire l’article « Et si nous ajoutions l’ennui dans les valises des vacances ? »).
Ce n’est pas toujours simple à mettre en pratique dans une société qui demande très rapidement aux enfants dans leur développement de se conformer à une forme de pensée qui ne leur est pas naturelle et où la consommation croissante des écrans et des réseaux sociaux éloignent les enfants d’eux-même.
Nous l’avons pourtant vu, l’accès à l’imaginaire est essentielle au développement de l’enfant et aura un impact dans le développement de son langage, de sa pensée, de sa bonne santé psychique, de ses représentations, de ses apprentissages, de ses liens aux autres, de ses capacités de créativité et d’abstraction. Au sein du 213 Centre thérapeutique, nous proposons, lorsque cela est nécessaire, des thérapies permettant de relancer l’activité créative, imaginaire et ludique, permettant ainsi à l’enfant de retrouver un mieux-être global.
Zoé Campus
Psychologue clinicienne ~ Thérapeute du développement ~ Thérapeute par le Jeu et la Créativité
Le trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité TDA/H est le diagnostic à la mode des années 2000. On en entend parler un peu partout : à l’école lors des réunions avec les enseignants, entre parents, à la radio, à la télévision, dans les journaux, etc.
Par ailleurs, l’agitation et les difficultés de concentration des enfants sont en effet encore aujourd’hui des motifs réguliers qui poussent les parents à consulter mais, trop souvent, ces jeunes patients sont rapidement étiquetés de « TDA/H » ou « d’hyperactif ». S’il est vrai que l’hyperactivité (agitation persistante, chronique) constitue le symptôme le plus visible et le plus aisément repérable, il ne constitue toutefois pas le fondement du diagnostic et peut refléter un tout autre tableau clinique.
Nous illustrerons au travers de cet article, la démarche diagnostique que nous proposons au sein du 213 centre thérapeutique lorsque nous rencontrons un enfant pour suspicion de trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H) après une brève introduction des notions d’attention, de concentration et d’agitation chez l’enfant et une présentation de ce qu’on appelle le trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H).
Concentration, agitation et développement
Attention/Concentration
Se concentrer demande un effort mental, surtout pour un tout petit. Afin de rester concentré, un enfant doit se forcer pour garder son attention sur sa tâche précise et ne pas se laisser distraire. Comme cela demande un effort, l’enfant va apprendre à la développer. La capacité de concentration de l’enfant va ainsi augmenter au fur et à mesure qu’il grandit. Il est toutefois impossible de dire le temps de concentration auquel un parent doit s’attendre selon l’âge de l’enfant. En effet, avant 5 ans, la capacité de concentration varie beaucoup d’un enfant à l’autre. Cela peut aller de seulement quelques secondes à 2 ou 3 minutes d’attention en continu (sans se lever, sans demander de l’aide, ni déplacer son attention sur autre chose). Selon la personnalité et les goûts de l’enfant, la capacité de concentration peut aussi être plus ou moins grande.
Il convient de ne pas confondre attention et concentration ! L’attention permet à l’enfant d’être réceptif à ce qui se passe autour de lui. Contrairement à la concentration, cela se fait sans effort, parfois même de façon involontaire. Toutefois, ce n’est pas parce qu’un enfant n’arrive pas à garder son attention sur une tâche, sans se laisser distraire par ce qui se passe autour de lui, qu’il a un trouble de l’attention. Plusieurs autres symptômes doivent être présents, comme nous le verrons plus loin, pour poser un diagnostic de trouble de l’attention.
Mais il est toutefois vrai aussi que dès l’âge de 2 ans, les premiers signes du TDAH peuvent apparaître. Certains parents observent même des signes dès la naissance ou les toutes premières semaines de vie. Par contre, il est aussi possible de n’avoir rien remarqué avant l’âge scolaire de l’enfant : des formes plus légères de TDAH ou des formes prédominées par des symptômes d’inattention sont souvent dépistées tardivement.
Par ailleurs, le fait que les parents aient tendance à s’ajuster spontanément aux besoin de leur enfant peut également avoir camouflé les symptômes. Chaque enfant étant unique, plusieurs évolutions sont possibles.
Agitation/hyperactivité
Bien qu’il soit normal pour un tout petit de bouger et de ne pas être concentré sur un jeu très longtemps, certains enfants sont plus actifs que d’autres. Rappelons que les enfants sont tous différents et que certains n’arrivent pas à s’asseoir calmement une minute ou deux alors que d’autres peuvent regarder avec attention un livre. Certains tout-petits de 3 ou 4 ans courent, sautent et grimpent au parc alors que d’autres jouent tranquillement avec un seau et une pelle. Ce n’est pas pour autant qu’ils présentent un TDA/H.
Gardons en tête que la plupart des enfants, avant 4 ou 5 ans, ont du mal à rester en place pour de longues périodes de temps. Si un enfant semble plus actif qu’un autre, cela peut d’abord s’expliquer par son tempérament. Chaque enfant a une constitution et des traits de caractère distincts, et c’est ce qui fait de chacun un être unique.
Par ailleurs, un enfant qui grandit dans une famille dynamique et active aura également tendance à aimer les activités qui « bougent ». Mais aussi, certains parents ont par ailleurs un niveau de tolérance plus grand à voir leur enfant bouger alors que d’autres parents les incitent plus rapidement au calme.
Il convient donc d’être prudent avant de parler de difficulté de concentration ou d’hyperactivité et ce, surtout chez un enfant d’âge préscolaire. Nous allons le voir, le diagnostic de TDA/H est un diagnostic difficile et complexe, qui regroupe une série de critères et une évaluation clinique approfondie réalisée par des professionnels aguerris.
TDA quoi ?
Le trouble du déficit de l’attention (TDA) avec (TDAH) ou sans (TDA) hyperactivité est un trouble neurodéveloppemental comprenant une inattention et/ou une hyperactivité – impulsivité cliniquement significatives (APA, 2013). C’est un trouble qui affecterait 7,2% de la population et serait associé à des altérations significatives du fonctionnement scolaire, social et/ou professionnel (Thomas et al., 2015 & APA, 2013). D’autres auteurs précisent que la prévalence moyenne chez les enfants seraient aux alentours de 5% et de 2,5% chez les adultes (Polanczyk, De Lima et al. 2007). Les symptômes et retentissement se manifestent généralement tôt dans la vie et sont chroniques (Barkley, 2015).
Voici les symptômes que l’on retrouve chez les patients TDA/H :
L’inattention qui correspond à une tendance excessive à la distraction qui se manifeste souvent de manière insidieuse, déroutante, voire sélective et occasionnelle. Le patient rencontre des difficultés à trier et hiérarchiser les diverses informations qui atteignent son cerveau (mécanisme inconscient). Il a du mal à détourner son attention de stimuli dits « perturbateurs », qui sont le plus souvent liés à l’environnement extérieur comme les bruits, une animation, un mouvement, etc. mais peuvent aussi être d’origine interne comme ses émotions, ses pensées, ses idées qui fusent, etc. Cela se traduit par des difficultés à maintenir son attention sur les activités en cours, une grande distractivité, une tendance à l’hyperfocalisation en particulier pour les tâches stimulantes et susceptibles de lui apporter une gratification immédiate, des oublis très fréquents, ainsi que du mal à suivre des instructions et des consignes dans leur intégralité, une mauvaise gestion du temps, des difficultés de planification, etc.
L’hyperactivité motrice est augmentée et désordonnée chez un enfant atteint de TDA/H par rapport aux enfants du même âge. Elle est le plus souvent désorganisée et non constructive (agitation permanente, instabilité, nervosité, incapacité à tenir en place). Les patients passent d’une tâche à l’autre sans vraiment les terminer, parlent beaucoup, sont continuellement en mouvement, dans le besoin de multiplier les activités. Elles recherchent fréquemment les sensations fortes, prennent des risques, ont souvent des tempérament explosifs et des difficultés à se détendre.
L’hyperactivité intellectuelle est retrouvée chez les patients atteints de TDA/H et correspond à une fuite des idées appelée « tachypsychie » constituée d’une pensée superficielle passant d’un sujet à l’autre sans lien évident pour l’entourage, jouant avec les mots, se distrayant très facilement. Ils ne peuvent fixer leur attention que peu de temps sur un sujet précis et il est donc extrêmement difficile pour un tiers de suivre leur cheminement intellectuel.
L’impulsivité est également retrouvée chez les patients TDA/H, caractérisée par des difficultés à inhiber les actions verbales, motrices, cognitives ou émotionnelles. Le patient agit ou parle sans réfléchir aux conséquences de ses actes ou de ses paroles, a de grandes difficultés à attendre pour obtenir ce qu’il veut, laisse échapper la réponse à une question qui n’est pas encore totalement formulée, interrompt ou couple la parole à ses interlocuteurs, impose sa présence dans les discussions, tout cela sans chercher pertinemment à importuner son entourage.
Le patient ne peut pas arrêter les pensées hors contexte qui viennent le distraire alors qu’il travaille. Il a des gestes brusques et rapides, souvent maladroits, il modèle très difficilement ses émotions par la raison.
Pour être considérés comme des symptômes, ces comportements doivent être présents depuis l’enfance (avant 12 ans), doivent être présents dans deux environnements au minimum et impacter significativement le fonctionnement du patient. Le patient doit présenter au moins six des neufs symptômes d’inattention et/ou d’hyperactivité/impulsivité décrits par le DSM-V. Le diagnostic de TDAH est posé sur base de l’omniprésence des symptômes et de leur retentissement au quotidien.
Établir le diagnostic de TDA/H est difficile car, prises isolément, les manifestations du trouble peuvent être présentes chez bon nombre de personnes et fluctuent en fonction des situations de vie et des spécificités de chacun. Le diagnostic est essentiellement posé sur base d’une évaluation clinique approfondie. Celle-ci permet d’établir les antécédents complets du patient, d’évaluer l’intensité de ses symptômes et leurs répercussions sur la globalité de sa vie. Le diagnostic du TDA/H se base sur des éléments objectifs. Temporalité, présence de symptômes, retentissement dans la vie quotidienne et exclusion d’autres troubles en font un trouble neurodéveloppemental à part entière qu’il faut bien connaître et évaluer.
« Nouveau » consensus – Que fait le neuropsy au 213 ?
Cette évaluation repose sur la clinique. Il n’existe pas à ce jour, de marqueur biologique ou de tests cognitifs pouvant identifier un TDAH ! On parle aujourd’hui de “nouveau” consensus parce que jusqu’ici, les neuropsychologues posaient le diagnostic de TDA/H sur base de la passation de testings neuropsychologiques (tests cognitifs).
L’évaluation du TDAH est donc aujourd’hui avant tout une évaluation clinique. Elle nécessite une évaluation comportementale grâce à plusieurs méthodes de collecte de données. Les principaux éléments de l’évaluation comprennent des entretiens avec les parents et les enseignants, des questionnaires et des observations du comportement de l’enfant dans des contextes variés.
Premier temps – La rencontre
Le neuropsychologue au sein du 213 vous proposera dans un premier temps, un entretien d’analyse de la demande avec l’enfant et ses parents afin d’évaluer la pertinence de l’évaluation et de recenser les difficultés actuelles. En effet, il est possible que les difficultés actuelles ne semblent pas relever d’un trouble, que celles-ci soient trop multiples et nécessitent un avis pluridisciplinaire, ou qu’elles semblent mieux expliquées par une autre cause et qu’une réorientation vers un autre professionnel soit recommandée.
Deuxième temps – La collecte des données
Si l’évaluation s’avère nécessaire, une série de questionnaire est alors transmise et devra être complétée par les parents, par l’enfant ainsi que par l’enseignant.e de l’enfant. Ceux-ci permettent de recenser les difficultés rencontrées par l’enfant dans les différentes sphères dans lesquelles il évolue et l’impact de celles-ci sur son quotidien et sur son fonctionnement.
Troisième temps – Les entretiens cliniques
S’en suit alors un entretien clinique permettant de creuser davantage les difficultés, d’investiguer la temporalité ainsi que les répercussions de ces difficultés sur le quotidien de l’enfant et de sa famille. Celui-ci permet également d’investiguer d’autres hypothèses diagnostiques. En effet, parfois, les difficultés de concentration sont accompagnées d’autres difficultés évoquant parfois d’autres troubles éventuels. Il est donc important d’effectuer un diagnostic différentiel afin de tenter d’évaluer plus précisément la/les cause.s des difficultés rencontrées.
Par après, une évaluation intellectuelle complète sera réalisée. Celle-ci se fait au moyen d’une échelle d’intelligence de Wechsler qui est une échelle standardisée et reconnue. Elle nous permet d’avoir une idée globale du fonctionnement de l’enfant et d’observer l’enfant face à une tâche. Ce qui nous intéresse ici ce ne sont pas les chiffres à proprement parler mais le comportement de l’enfant face à une tâche et la disparité éventuelle dans les résultats. Est-ce que l’enfant à tendance à se précipiter ? Est-ce qu’il est facilement distrait ? Est-ce qu’il a tendance à digresser ? Est-ce qu’on relève une fatigabilité ? Est-ce qu’une anxiété de performance est observée ?
Dans le cas où des disparités très importantes sont relevées, une évaluation approfondie des fonctions cognitives sera éventuellement proposée.
Quatrième temps – La remise des conclusions
Le neuropsychologue croise ensuite toutes les données récoltées. Dans le cas d’une co-évaluation avec une des psychologues du 213, une réunion est organisée afin de discuter et de croiser les regards sur l’enfant. Vient ensuite la rédaction du rapport et la remise des conclusions aux parents.
Par la suite et selon la problématique, plusieurs pistes d’aide seront proposées aux parents en fonctions des éléments mis en lumière lors de l’évaluation.
Diagnostic différentiel – Que fait le psy au 213 ?
Il est nécessaire d’éliminer les autres causes possibles des symptômes observés chez le jeune lorsque nous rencontrons un enfant pour suspicion de TDA/H. Il existe en effet plusieurs troubles psychologiques ou physiques qui présentent une symptomatologie similaire ou s’apparentant au TDAH. Cette démarche d’analyse est ce que l’on appelle le « diagnostic différentiel ». C’est un processus qui envisage tous les troubles pouvant expliquer la symptomatologie existante. Le diagnostic de TDAH est alors seulement établi lorsque toutes les autres hypothèses possibles ont été éliminées. C’est un travail que le psychologue du 213 réalise toujours en concertation avec le neuropsychologue du 213 au termes de rencontres avec l’enfant et sa famille pour préparer l’entretien de remise des conclusions.
Le psychologue du 213 est ainsi très attentif au caractère « fourre-tout » que peut présenter le diagnostic du TDA/H qui présente de nombreux facteurs de confusions. En effet, peuvent se voir diagnostiqués comme ayant un TDAH, des enfants présentant une épilepsie, des enfants traumatisés ayant un parcours de vie douloureux, des enfants présentant des troubles du sommeil, des enfants immatures ou avec un retard du développement, à l’inverse des enfants présentant un fonctionnement à haut potentiel intellectuel, des enfants au fonctionnement psychotique, des enfants porteurs de TSA (trouble du spectre de l’autisme), des enfants ayant des troubles instrumentaux (dyslexies, dysorthographies, dyspraxies, etc.), des enfants présentant des troubles sensoriels, des troubles obsessionnels, de l’anxiété, une schizophrénie, des troubles de l’humeur, etc. et même des enfants qui ne présentent aucun trouble mais se trouvant dans une période de difficulté passagère ou réactionnelle.
Comment ?
C’est pourquoi, au sein du 213, en plus de l’évaluation clinique neuropsychologique spécifique indispensable, nous proposons une approche d’évaluation psychique globale de l’enfant à la fois dans une démarche de diagnostic différentiel mais également pour aller à la rencontre de l’enfant et pouvoir rendre un avis psychoaffectif complémentaire aux observations du neuropsychologue.
Une première rencontre en présence du neuropsychologue, de l’enfant et de son.ses parent.s permet généralement d’analyser la demande et de comprendre dans quel contexte s’inscrivent les symptômes. Ensuite, trois rendez-vous individuels sont proposés à l’enfant afin de réaliser une évaluation psychoaffective permettant d’apprendre à le connaître, de lui offrir la possibilité d’exprimer son rapport à ses symptômes et les éventuelles souffrances qui en découlent, d’évaluer son fonctionnement intrapsychique (angoisses, mécanismes de défenses, structure de personnalité, etc.), son estime de lui, son rapport à ses émotions et ses relations sociales.
Rappelons d’ailleurs qu’environ la moitié des enfants souffrant d’un TDA/H présentent d’autres difficultés comme des troubles des apprentissage, de l’anxiété, de l’opposition, des problèmes de langage, des difficultés motrices ou encore d’autres troubles affectifs. Ces difficultés diverses occasionnent souvent des difficultés de socialisation et une mauvaise estime de soi. Certains enfants ayant un TDA/H présentent également des symptômes dépressifs.
Soutien familial
Enfin, les psychologues et thérapeutes familiaux au sein du 213 Centre thérapeutique se montrent en parallèle à l’évaluation ou dans un second temps, disponibles pour accompagner la place de l’enfant dans son système familial lorsque les symptômes rapportés font souffrance pour l’ensemble de la famille (qu’un diagnostic de TDA/H soit posé ou non).
Pour les enfants porteurs de TDAH, les crises de colère sont par exemple courantes ce qui peut créer des tensions importantes au sein de la famille. Les conflits avec la fratrie ont aussi tendance à être fréquents, ce qui peut créer une dynamique familiale agitée. De plus, la période des devoirs tend aussi à être difficile, ce qui peut générer des conflits entre l’enfant et ses parents. Enfin, les routines sont longues et difficiles à acquérir pour ces enfants qui se laissent constamment distraire lorsqu’ils doivent les appliquer, ce qui a tendance à exaspérer et à impatienter les parents.
Conclusion
Vous l’aurez compris, au sein du 213 Centre thérapeutique, nous sommes particulièrement attentifs au caractère pluridisciplinaire et à l’importance de croiser les regards des professionnels de l’équipe (et/ou du réseau scolaire, médical et paramédical de l’enfant) de manière générale mais encore plus dans le cadre d’un diagnostic aussi spécifique que le TDA/H.
Cela ne veut toutefois pas dire que l’enfant sera systématiquement vus par tous les professionnels de l’équipe et qu’il devra être soumis à une multitude de rendez-vous. Chaque situation étant bien sûre unique, nous fonctionnons au cas par cas, en fonction de l’enfant, de son contexte actuel, de sa famille et de son intérêt. Mais une chose reste sûre, les professionnels de l’équipe sont porteurs d’une pensée pluridisciplinaire et n’hésitent pas à solliciter leurs collègues et/ou le réseau dans l’intérêt de l’enfant et de sa famille et dans le respect du secret professionnel et ce, afin de proposer à nos patients un travail de qualité et éthique.
Zoé Campus
Psychologue clinicienne ~ Thérapeute du développement ~ Thérapeute par le Jeu et la Créativité
Saint-Nicolas et Noël approchent à grand pas ! S’il est parfois plus facile d’offrir le jouet de ses rêves à un enfant plus âgé, le sélectionnant lui-même d’ailleurs très souvent dans un catalogue de jouets, il peut parfois s’avérer plus difficile de savoir vers quel jouet se tourner pour un tout-petit. Mais d’ailleurs, ces jouets sont-ils tellement indispensables au bien-être et au développement de l’enfant ?
Vous avez très certainement déjà été témoin de scènes où un tout petit s’intéressait davantage aux lacets des chaussures des invités alors qu’il était entouré d’objets et de jouets spécifiques, spécialement conçus pour stimuler et favoriser son développement. Vous verrez qu’on peut très bien éveiller les sens du tout petit, avec presque trois fois rien et que le contenu de nos armoires à la maison sont de véritables cavernes d’Ali Baba pour eux !
Le jeu chez le bébé
Saviez-vous que le jeu est une activité reconnue par l’article 31 de la Convention des Nations unies relative aux Droits de l’Enfant ? Sa valeur, de plus en plus évidente dans le développement, la santé et le bien-être des enfants, a contribué à la mise en place de politiques gouvernementales visant à s’assurer que tous les enfants aient accès à des expériences de jeu appropriées.
En jouant, l’enfant développe notamment des capacités essentielles telles que se sentir bien dans sa peau (narcissisme primaire), apprendre qu’il a de la valeur (estime de soi), apprendre à donner et recevoir des sentiments (bagage affectif), renforcer son assurance d’être aimé pour lui-même (sécurité intérieure), apprendre à partager sur ce qu’il ressent (bagage émotionnel). Mais si le jeu participe ainsi au développement social et psychoaffectif de l’enfant, il a également une fonction essentielle dans le développement cognitif, langagier, physique et moteur et ce, dès son plus jeune âge.
La question du jeu chez le bébé concerne plus particulièrement la période spécifique du développement appelée « sensori-moteur » (0-2 ans) où l’ensemble des échanges avec le bébé passe par le corps. Durant la période sensori-motrice, l’enfant ne joue qu’en présence de l’objet (personne ou jouet).
On peut classer les jeux chez le bébé en deux grandes catégories :
Les jeux « solitaires » où le bébé, seul, manipule des objets ou des parties de son corps. Les jeux solitaires font partie de la stratégie d’appropriation et de connaissance du monde par le bébé, aussi bien de son corps propre que des objets environnants. Ces jeux soutiennent l’éveil cognitif du bébé.
Les jeux avec un partenaire, où le bébé, surtout au début, apparait comme celui avec lequel on joue même si très rapidement, le bébé deviendra un partenaire actif. Les jeux relationnels participent largement au développement des interactions (activités ludiques qui se déploient en dehors des échanges liés aux soins primaires, comme la toilette ou l’alimentation) qui permettent au bébé d’accéder au langage et à la symbolisation et ce, grâce au portage relationnel.
Le jeu n’existe pas sans plaisir partagé, ce qui implique nécessairement l’existence d’interactions parents-enfants, gratifiantes, contenantes et cohérentes. Pour faciliter la lecture des différents jouets existant pour le tout-petit, nous les classons ci-dessous par groupe d’âge mais insistons encore sur toute l’importance de la présence de l’adulte (active, ludique ou dans une attention soutenue) dans la découverte des jouets dans le jeu du et avec le bébé.
0-3 mois – Interactions et découverte de l’environnement
De 0 à 3 mois, un bébé se montre davantage intéressé et stimulé par le visage et la voix des personnes significatives pour lui que par les jouets. Les interactions que les parents ont avec leur tout-petit comptent beaucoup pour l’amuser et stimuler ses sens. Il a donc à cette période de sa vie, surtout besoin de la présence aimante et chaleureuse de ses parents.
Il commence à peine à distinguer les couleurs, c’est surtout les contrastes qui attirent son attention. Ses périodes d’éveil étant encore peu nombreuses, il convient d’être attentif à ne pas le surstimuler, lui qui doit déjà beaucoup assimiler toutes les stimulations et découvertes de son environnement.
Le bébé va apprendre les jeux de bouche. Il va jouer à téter, ouvrir et fermer la bouche, mâcher, mordiller, rythmer le flux du lait, avaler, retenir, lâcher, faire couler, sucer. La bouche est un muscle que le bébé met à l’épreuve et, avec lui, les effets sur son corps et sur ceux qui l’entourent. Les jeux de bouche vont ainsi permettre chez le bébé la construction de son identité corporelle, du sentiment d’être entier.
Exemple de jeux :
Ses parents qui lui parlent, le bercent, lui chantent des chansons douces, le caressent, le massent, etc;
Les cartes ou livres de contrastes;
Doudou ou peluche douce (lavée au préalable et non allergisante).
Exemple de jeux DIY :
Découper des formes géométriques simples dans du papier noir et les coller sur du papier blanc (ou inversement);
Ecouter de la musique douce et mélodieuse.
3-6 mois – Les sens en éveil et la coordination oculo-manuelle
Au cours de ses premiers mois, un bébé apprend à découvrir son environnement avec tous ses sens. Les objets l’attirent en raison de leurs couleurs, de leur brillance, de leur mouvement, de leurs sons et de leurs textures. Il les regarde, les touche et écoute les sons qu’ils produisent. Cela stimule ses sens et favorise petit à petit le développement de sa motricité.
La coordination œil-main est mise en évidence vers 10-12 semaines, lorsque le bébé couché sur le dos porte délibérément ses mains à sa poitrine et joue avec ses doigts. Dans la même période, lorsqu’il est couché sur le ventre, tenant la tête et les épaules de façon constante, il ouvre et ferme ses mains pour gratter la surface de l’endroit où il se trouve, avec une appréciation simultanée de la vue et du son. Un jouet mobile comme un hochet peut être serré et amené vers le visage, mais parfois l’enfant peut se cogner avec le jouet et il se lasse vite au niveau visuel.
Vers 3 mois, le bébé commence ainsi à s’ouvrir au monde extérieur et à attraper et manipuler les objets. Il voit mieux les jouets. Il distingue les couleurs, son champ de vision s’élargit, il porte les objets à sa bouche et distingue les différentes matières.
C’est vers 4 mois que les jouets deviennent plus importants pour l’enfant, lorsqu’il commence à pouvoir les saisir volontairement. En effet, vers 18 à 20 semaines, le bébé peut atteindre et saisir le hochet qu’on lui présente, l’observer de façon prolongée et le secouer. Il peut serrer et desserrer des objets alternativement et porter des objets vers sa bouche ou les en éloigner.
Vers 5-6 mois, il aime les objets qu’il peut prendre facilement avec ses mains et encore plus ceux qui font du bruit. Il commence a comprendre la permanence des personnes mais pas encore celle des objets. Quand un jouet tombe de ses mains, sauf s’il reste dans son champ de vision, il cesse d’exister pour lui.
Exemple de jeux :
Tapis d’éveils,
Mobiles musicaux,
Hochets
Boites à musique
Peluches douces, tissus de différentes textures
Jeux de dentition, anneaux de dentition
Jouets qui flottent dans le bain,
Miroirs,
Livres en tissus.
Exemple de jeux DIY :
Dans un tupperware, placer des guirlandes lumineuses de toutes les couleurs;
Sac sensoriel : remplir un sac de congélation d’eau et d’éléments au choix (pompons, coquillages, paillettes, sequins, morceaux de papier aluminium, boutons, petits pois, élastiques de couleur, etc. ), bien le fermer et le scotcher sur le sol ou sur un carton;
Sacs sensoriels de différentes couleurs : dans plusieurs sacs de congélation, verser de l’eau avec des colorants alimentaires de couleurs différentes. Bien les fermer et les scotcher au sol ou sur un carton;
Sacs sensoriels de saison : remplir plusieurs sacs de congélation d’eau et y ajouter des feuilles, des fleurs ramassées dans votre jardin ou lors de promenade. Bien fermer le sac de congélation et le scotcher au sol ou sur un carton;
Bouteille sensorielle : dans une bouteille vide, y remplir de l’huile de paraffine et y ajouter les éléments que vous souhaitez (paillettes, sequins, pompons, étoiles, etc.);
Accrocher à son arche de jeux un ballon de baudruche légèrement gonflé, du feuillage du jardin, une éponge de douche, des spatules de cuisines de couleur différentes, des foulards de couleurs différentes, etc;
Scotcher au sol du papier bulles;
Remplir des bocaux avec des pâtes, des pompons, des coquillages, du maïs, etc.;
Réaliser un cerceau d’éveil sensoriel.
6 mois-9 mois – Exploration sensorielle et début de la permanence de l’objet
Le bébé poursuit l’exploration de son corps et de son environnement. Les jeux qui permettent la stimulation du toucher sont toujours gagnants. A partir de 6 mois, un tout-petit aime manipuler des objets de différentes formes et de différentes tailles. Ces activités l’exercent à bouger et utiliser ses mains et ses doigts pour saisir les objets.
Vers 7 mois, le bébé est capable de passer un jouet d’une main à l’autre avec un relâchement manuel volontaire. Vers 8 mois, il peut tenir assis de façon constante sur le sol, aller chercher des jouets à portée de main sans tomber, et atteindre des objets qu’il visualise. Tout ce qu’il trouve, il le suce, le mordille. Il sait se retourner, attraper ses pieds et tenir assis. Il apprécie de plus en plus le bain qui devient un moment de jeu. A table, il découvre les premiers aliments solides, les petites cuillères.
La permanence de l’objet se développe autour de 9-10 mois, et se manifestera par exemple lorsque le tout-petit lèvera un petit coussin pour regarder un objet de jeu caché en dessous. Peu de temps après, il développera ses capacités pour détecter un objet caché.
Au cours de cette période, l’enfant aime par ailleurs combiner simultanément les sensations tactiles et le bruit, en frappant ou frottant des objets. Le bébé apprécie également regarder un livre avec un adulte, il apprécie les images mais également les livres qui permettent de toucher différentes textures.
Exemple de jeux :
Doudous, peluches;
Hochets;
Livres en carton;
Tapis d’éveil;
Jouets de bain;
Anneaux de dentition;
Boîte à musique;
Jouets de poussette;
Culbuto;
Bulles de savon.
Exemple de jeux DIY :
Planter des bâtonnets en bois dans une boite à œufs vide. Votre bébé se fera un plaisir de tous les sortir;
Dans un moule à cupcake, cacher des animaux en plastique dans chaque compartiment et les recouvrir de masking tape afin d’inviter l’enfant à les retirer;
Insérer des cure-pipes de différentes couleurs dans une passoire et inviter l’enfant à les retirer;
Proposer à votre enfant des paniers de « boite à trésors » sur des thèmes différents;
Peindre avec du yaourt : mélanger une dizaine de gouttes de colorant alimentaire dans un pot de yaourt;
Peindre dans un sac sensoriel : déposer de la peinture de différentes couleurs sur un papier que vous glisser ensuite dans un sac de congélation. Vous fermez le tout et le scotcher bien tout en invitant votre enfant à peindre en appuyant sur le plastique en réalisant des mouvements avec ses mains ou ses pieds.
9 mois-12 mois – Motricité et transition vers l’autonomie
Vers 10 mois, un bébé est plus habile dans ses manipulations et il commence à s’amuser à vider et à remplir à répétition des contenants, à les ouvrir et à les fermer. L’armoire à tupperware devient alors très attirante pour lui. Il s’amuse aussi beaucoup avec des contenants au moment du bain. A cet âge, il aime aussi emboiter les objets et construire des tours de blocs. Coller et décoller des velcros est une autre activité que les bébés apprécient et les aide à développer leur motricité fine. Les parcours à obstacles l’amusent également beaucoup et lui permettent d’explorer et de développer sa motricité globale.
Durant cette période, le bébé commence également à comprendre la communication verbale de ses personnes de référence. Il commence également à trouver un sens à son monde intime et aime regarder et écouter les adultes familiers, être touché, parler et jouer avec eux. Le tout-petit se situe à cette période, entre un besoin de proximité avec ses personnes de référence et un besoin d’explorer, tout en intégrant activité motrice, vivacité sensorielle et satisfaction émotionnelle.
Les imitations brèves et immédiates indiquent la possession d’une mémoire à court terme chez l’enfant, poursuivie par la mise en place d’une mémoire à long terme. Toutes sortes de souvenirs sont alors stockés, associés à des expériences somatiques, cognitives et affectives significatives, pour une reconnaissance instantanée, une récupération et un assemblage créatif en cas de besoin.
Exemple de jeux :
ballon, ballons en mousse;
Bloc de tissus ou de caoutchouc;
Contenant à remplir et vider;
Instruments de musique;
Jouets à emboîter, empiler;
Jouets à pousser, à tirer;
Jouets présymboliques pour imiter (téléphone, poupée, dinette, etc.);
Livres d’images cartonnés;
Miroir incassable;
Ourson;
Tableau d’activités;
Tunnel en toile;
Piscine à balles;
Petit toboggan;
Boite à formes;
Animaux en plastique de couleur.
Exemple de jeux DIY :
Coller un grand carré de papier pour recouvrir les cahiers, face collante vers vous. Disposez dans un panier toute une série d’éléments que l’enfant pourra venir coller dessus (pompons, plumes, morceaux de pailles, yeux, stickers en mousses, etc.);
Bac sensoriel comestible : dans un bac en plastique, déposer des céréales loops (ou équivalent) mixés au blender pour constituer votre sable et y déposer dessus des animaux en plastique. Vous pouvez également y déposer des flocons d’avoine colorés avec du colorant alimentaire. Votre bébé pourra ainsi porter à sa bouche les éléments du bac sans danger;
Dans un grand bac en plastique, proposer toute une série de contenants et d’objets de la cuisine (bols en plastique, cuillères, tupperware, casserole, etc.) pour réaliser des jeux de transvasement;
Emballer des petits objets (formes géométriques, animaux en plastique, etc.) dans des boules de papier aluminium et inviter l’enfant à les défaire;
Coincer des pompons dans un fouet et inviter l’enfant à les enlever.
Conclusion
Vous l’aurez compris, jouets et jeux d’éveil proposés au tout-petit stimulent ses cinq sens et lui permettent de s’ouvrir au monde et d’appréhender ce qui le constitue. Ces premiers jeux sensoriels sont le dictionnaire du monde du bébé qui ouvrent à la connaissance de soi et de son environnement. Ces jeux vont accompagner les premières séparations du tout-petit (séparations sensorielles, émotionnelles, spatiales, relationnelles, affectives, etc.). Il doit pouvoir jouer alternativement seul et avec un adulte de référence et doit également pouvoir faire l’expérience de l’erreur. En jouant seul, le bébé va se tromper, ne pas réussir et cela lui permettra d’apprendre sur lui et sur l’objet. Aussi, le jouet sensoriel, de par la variété des expériences ludiques qu’il propose, renforce le sentiment d’être du bébé, nourrit son narcissisme primaire et fortifie sa sécurité intérieure.
Le jeu moteur, quant à lui, permet au bébé de multiplier les initiatives. En dominant l’espace, le tout-petit va rencontrer le monde des affects et en jouer. Il apprend ainsi à convoiter le mouvement qui le conduit vers l’autonomie et l’émotion qui s’y attache. Le jeu moteur prend ainsi la dimension d’un acte fondateur dans la construction de la personnalité de l’enfant.
Notons enfin qu’il existe des jouets adaptés pour chaque âge et qu’il ne sert à rien d’offrir à un enfant des jouets complexes s’il n’est pas capable de percevoir les matières, les couleurs, etc. De même qu’un seul jouet suffit pour amuser un enfant et lui donner envie de l’exploiter. Il convient d’ailleurs d’être attentif à ne pas surcharger la chambre ou l’espace de jeu du bébé, ce qui l’empêcherait de jouer. L’idéal est le coffre à jouets ou les paniers qui permettent de laisser quelques jouets à disposition et de ranger les autres.
Zoé Campus
Psychologue clinicienne – Thérapeute du développement – Thérapeute par le Jeu et la Créativité
La méditation de pleine conscience, mindfulness en anglais, est une technique de méditation qui trouve son origine dans le bouddhisme. Elle a été laïcisée et introduite dans le champ de la médecine par Jon Kabat-Zinn, professeur de médecine. Il a fondé dans les années 80 la Clinique de Réduction du Stress au sein de la Faculté de Médecine de l’Université du Massachussetts où il a créé le programme de réduction du stress basé sur la pleine conscience MBSR (Mindfulness-Based Stress Reduction). Le MBSR est un programme éducatif et préventif qui s’adresse à toute personne souhaitant s’engager dans un travail personnel afin d’améliorer sa manière de vivre. Il vise à accepter le moment présent tel qu’il se présente et à développer l’aptitude à répondre de manière plus efficace au stress. Ici le terme Stress fait référence à la notion de Dhukka (terme Pali) qui signifie souffrance, insatisfaction et qui peut prendre des formes différentes selon les individus. Le programme MBSR a par la suite inspiré le programme MBCT (Mindfulness-Based Cognitive Therapy). Vers la fin des années 90, trois psychologues et chercheurs (Z. Segal, M. Williams et J. Teasdale) se sont basés sur le programme MBSR pour développer le programme MBCT. Son contenu est 80% à 90% identique au programme MBSR mais il intègre des éléments de thérapie cognitive. Son objectif est de réduire les risques de rechute dépressive.
La méditation de pleine conscience consiste à porter son attention sur le moment présent sans jugement de valeur et sans attente. Les pratiquants peuvent observer leur respiration, leurs sensations et émotions telles qu’elles se présentent en adoptant une attitude d’acceptation et de non jugement envers toute expérience y compris les pensées, sensations, émotions ou comportements difficiles. Ils apprennent à reconnaître leurs réactions habituelles aux difficultés et à réduire les modes de réponse automatiques.
Comment cela se passe concrètement ?
Les programme MBSR se compose de 8 séances collectives hebdomadaires de 2h30, la 1ère séance et la dernière durent 3h. Le programme MBCT se compose de 8 séances collectives hebdomadaires de 2h. Les deux programmes comprennent une journée de pratique intensive et une séance d’information au préalable. On demande également aux participants de consacrer une séance d’entraînement de 45 minutes par jour. La pratique de la méditation dans les deux programmes comprend l’entraînement à l’attention par le scan corporel, des étirements et du yoga en pleine conscience, la méditation assise et la marche consciente. Ce programme demande un engagement important de la part des participants et de l’instructeur dont la pratique personnelle nourrit son enseignement.
Lors du programme MBSR le travail est axé sur l’observation des réactions automatiques, au niveau des pensées et des émotions, qui alimentent le stress et la souffrance et sur le développement de nouvelles réponses. Lors du programme MBCT, le travail est axé sur l’observation des schémas de pensées négatives qui alimentent l’humeur dépressive. Des éléments de thérapie cognitive sont inclus dans le programme.
Ces deux programmes ont inspiré d’autres programmes basés sur la pleine conscience tels que la MAP (Mindfulness Awareness Practive) ou le MYmind. Aux Pays-Bas, Eline Snel, thérapeute, a mis au point une formation à la pleine conscience pour les enfants à l’école qui est basée sur les programmes décrits ci-dessus.
Pourquoi pratiquer la méditation de pleine conscience ?
La méditation de pleine conscience est aujourd’hui de plus en plus utilisée en médecine et en psychothérapie. Les programmes basés sur la pleine conscience sont actuellementreconnus par la communauté médicale internationale comme un soutien effectif dans un certain nombre de troubles. Dans leur meta-analyse, Koury et al. (2013) ont conclu que la thérapie basée sur la pleine conscience est un traitement efficace pour différents problèmes psychologiques chez l’adulte notamment pour réduire l’anxiété, la dépression et le stress.
Chez les enfants, un nombre croissant d’études a montré l’intérêt de la méditation de pleine conscience. Ces intérêts concernent l’équilibre émotionnel, les capacités de résilience, la qualité des échanges familiaux et les capacités attentionnelles, notamment dans le travail scolaire et les apprentissages. On a aussi montré l’intérêt pour les parents de pratiquer eux-mêmes la pleine conscience.
Des recherches récentes ont également montré que des programmes de pleine conscience adaptés à la problématique du TDAH (Trouble Déficitaire de l’Attention avec ou sans Hyperactivité) menés auprès des enfants et auprès des enfants conjointement à leurs parents se montrent efficaces pour diminuer l’intensité de la symptomatologie propre au TDAH.
Les avantages de la pratique de la pleine conscience sont nombreux, pour les jeunes et les moins jeunes, que l’on ait des difficultés de santé ou non. Les capacités à vivre en pleine conscience sont innées chez chacun de nous. En grandissant nous les laissons de côté au fur et à mesure que nous privilégions le « faire » au lieu de l’« être » et que nous pensons davantage au passé et au futur. Pratiquer la méditation de pleine conscience nous permet alors de retrouver et de renforcer cette capacité innée à être dans l’instant présent. Elle nous permet de prendre conscience de nos réactions automatiques au niveau de nos pensées, émotions et comportements et à sentir ce dont nous avons besoin dans l’instant présent. Nous apprenons alors à mieux nous connaître et à nous accepter tels que nous sommes et peu à peu à développer plus de bienveillance envers nous-mêmes et envers les autres.
Que proposons-nous au sein du 213 Centre thérapeutique ?
Nous proposons des outils de pleine conscience au sein de nos séances lorsque le patient est réceptif à ces outils. Ces outils prennent la forme de courtes méditations guidées que l’enfant ou l’adolescent peut refaire lorsqu’il en ressent le besoin pour retrouver le calme, déplacer son attention de ses pensées vers sa respiration ou juste avant de s’endormir.
Au 213 nous avons à cœur de penser l’enfant dans son ensemble et avons d’ailleurs le projet futur de créer des ateliers d’initiation à la méditation de pleine conscience afin d’offrir un espace permettant aux enfants d’explorer tous ces bienfaits. Restez connectés pour plus d’infos prochainement à ce sujet !
Innocent Mutel, D., (2017). La pleine conscience : une nouvelle technique thérapeutique pour les enfants TDAH ? Les Entretiens de Psychomotricité 2017.
Koury B., LecomteT., Fortin G. et al. Mindfulness-based therapy : A comprehensive meta-analysis. Clin. Psychol. Rev., 2013.
Snel, E. (2010). Calme et attentif comme une grenouille. Les Arènes.
Depuis plusieurs années maintenant, les rayons des librairies regorgent et débordent de livres au sujet de « l’éducation positive et bienveillante » (parentalité positive ou psychologie positive), on entend à la radio et à la télévision énormément d’experts prônant ce style éducatif tendance et bon nombres d’articles ou d’outils sont exposés à ce sujet sur la toile.
Source : C. Goldman (2020)
Ce courant éducatif existe depuis 2006 mais c’est notamment les découvertes récentes des neurosciences qui ont permis de faire émerger ces thèmes et qui ont appuyé l’effet de mode. La parentalité positive vise une ambiance bienveillante et sereine à la maison afin d’éviter les crises de colère, les oppositions et les punitions incessantes. L’objectif premier de ce courant est d’inviter le parent à écouter et respecter les besoins de l’enfant pour permettre à ce dernier d’avoir confiance en lui, à parler de ses émotions, à communiquer dans le respect et reconnaître ce que les autres ressentent. Une importance essentielle est accordée à la place de l’empathie dans la communication. Selon la parentalité positive, un enfant qui se comporte mal cherche à exprimer un besoin.
Mais force est de constater que la démocratisation et l’effet de mode autour de ce courant éducatif rime trop souvent avec approximation voire désinformation sur le sujet et que trop souvent, “désir” et “besoin” sont confondus. Beaucoup pensent dès lors que la parentalité positive est une méthode permettant d’obtenir les mêmes résultats que l’éducation traditionnelle avec des méthodes douces, confondant ainsi parentalité positive et laxisme, absence de limites ou absence de toute frustration. Ajouté à cela le fait que notre société qui est plongée dans une course à la performance et à la consommation, se montre très intransigeante envers les parents, déclarés coupables de tous les maux de leurs enfants.
Perte de repères pour les parents
En conséquence, nous rencontrons régulièrement en consultation au 213 Centre thérapeutique, bon nombre de parents épuisés, déprimés ou en burnout parental. La barre étant placée trop haute, ces derniers se sentent rapidement incompétents et culpabilisent de ne pas y arriver; se sentant dupés et en ayant l’impression d’avoir pourtant appliqués tous les outils qu’ils ont lu, entendu ou qu’on leur a conseillé « pour être des parents parfaits ». Car oui, c’est ce que notre société leur demande en filigrane.
Certains parents craignent ainsi de perdre l’amour de leur enfant s’ils lui opposent une limite, un refus. En réalité, nous allons le voir, même s’ils les accepte mal, l’enfant est rassuré par des règles claires et fermes. Une absence d’interdits ou des règles qui changent sans cesse, ou qui sont respectées selon l’humeur, insécurisent l’enfant et ne lui donnent pas l’assise nécessaire pour aller de l’avant. Le parent se retrouve lui-même rapidement en perde de repère et pris à son tour dans insécurité dans sa fonction parentale.
D’autres parents craignent de jouer le « mauvais » rôle auprès de l’enfant s’ils se montrent personnellement plus sévères ou plus stricts que l’autre parent. C’est oublier que les rôles parentaux sont complémentaires, asymétriques et que c’est dans la différence que l’enfant se construit. L’unité de point de vue des parents quant aux limites est bien évidemment importante, mais l’enfant peut comprendre que les règles divergent dans ses différents univers de vie.
Source : C. Goldman (2020)
D’autres parents encore en situation de séparation conjugale par exemple, préfèrent laisser tout faire à l’enfant, estimant qu’il vaut mieux préserver de tout conflit le peu de temps passé ensemble. Cette attitude qui peut être compréhensible est, pour l’enfant, une occasion manquée de construire sa sécurité de base.
Mais à quoi servent alors les limites dans le développement de l’enfant ? Quelles sont les conséquences pour l’enfant si celles-ci ne sont pas intégrées ? Qu’en est-il des règles et des sanctions ? Nous vous proposons de parcourir cela ensemble ci-dessous.
A quoi servent les limites et la frustration ?
Parentalité positive ne rime donc pas avec absence d’apprentissage de la frustration, absence de limites, de cadre et de structure. Notre société est en effet faite de règles et est organisée selon un cadre délimité et structuré. Il est essentiel que les enfants qui arrivent au monde soient accompagnés dans cet apprentissage afin qu’ils puissent s’appuyer sur la structure et limites familiales comme repère pour les aider à se constituer et à développer leur propre sécurité interne pour fonctionner dans le monde et ainsi pouvoir s’adapter aux autres et au monde social et entrer dans les apprentissages et la vie active.
Repères et interdits sont ainsi nécessaires et même essentiels au développement de l’enfant. Ne pas les leur transmettre, peut les exposer à des difficultés, nous le verrons plus loin. Beaucoup d’enfants aujourd’hui se retrouvent malheureusement face à du vide, dans une vie sans repères, ni boussole, dans un monde qui n’est plus balisé par rien, faute d’adultes capables d’en expliquer clairement les lois et de garantir, qu’elles soient respectées (très souvent, eux-mêmes pris dans une société en perte de repères et de sens).
Les limites ont une fonction dans le développement du narcissisme : Pour grandir, un enfant a besoin de ses parents. Avancer, grandir suppose que l’enfant remette, à chaque étape, ses cartes en jeu, qu’il accepte de quitter le palier confortable, agréable et rassurant qu’il a atteint, et se risque pour gagner l’étage supérieur. Cela implique aussi une capacité à affronter une incompétence momentannée avec ce que cela suppose de frustration. Lacher la sécurité rassurante nécessite un coup de pouce des parents. Lorsqu’un enfant voit son parent hésiter ou silencieux, il interprète souvent cela comme une preuve qu’il ne le croie pas capable de « mieux » et cela peut influer sur la construction de son narcissisme, du sentiment qu’il a de sa valeur. C’est en affrontant les difficulté et en se prouvant à lui-même qu’il peut les surmonter qu’un enfant acquiert une confiance en lui. Si on ne réussit jamais rien, comment être fier de soi ?
Les limites ont une fonction dans le développement de l’estime de soi : L’enfant sans limite, qui passe son temps à transgresser se sent constamment décevant et peut en retirer une image négative de lui-même. Ce sont très souvent des enfants qu’on ne supporte plus, avec qui on a pas envie de passer un moment parce qu’on sait à quel point cela sera compliqué. Vous pouvez dès lors imaginer à quel point cela peut renvoyer une image négative de lui-même à l’enfant.
Les limites ont une fonction dans le développement des liens sociaux : Face à des enfants qui n’ont pas intégré de limites, la proximité est souvent remplacée par la peur et le partage est remplacé par la violence. Il n’y a plus de moment agréable passé avec l’enfant, car les émotions de plaisir sont trop mélangées avec la colère (pour ce qu’il a fait), la tristesse (d’en être arrivé là) et la peur (de l’avenir). Le lien à l’autre peut alors se desserrer peu à peu. Par ailleurs, si on ne pose jamais de limites à un enfant cela peut impacter ses liens avec les autres. Durant toute sa vie, ses relations avec les autres activeront l’excitabilité de l’enfant puis de l’adulte qu’il deviendra. Il devra se retenir de flamber en répondant avec les poings, de livrer le fond de sa pensée aux professeurs, de séduire la fiancée de son meilleur ami, etc. L’apprentissage de la frustration lui épargnera de buter éternellement contre l’insatisfaction inhérente à toutes relations humaines, qu’elles soient intime ou sociale.
Les limites ont une fonction dans le développement la sa sécurité interne : Un enfant ne peut pas se sentir protégé par des adultes qui n’arrivent pas à lui imposer à lui, la moindre règle. Par ailleurs, l’enfant a besoin d’accéder à la compréhension des lois sociales. Ces règles ne s’apprennent pas à 12 ans mais bien à partir de 2 ans. Ce qui permet à un adolescent d’être dans la loi, c’est-à-dire de résister aux tentations du monde et surtout au « pulsionnel » en lui, à l’envie animale et normale de prendre, frapper, etc. c’est d’avoir appris à le faire pas à pas depuis toujours. Pas seulement au travers de bonnes paroles mais au travers d’actes, de règles posées dans le quotidien à propros de toutes les choses de la vie.
Source : C. Goldman (2020)
Les limites ont une fonction dans le développement des aptitudes attentionnelles : en effet, ne pas poser de limites à un enfants peut, à termes, impacter ses apprentissages et aptitudes attentionnelles.
Enfin, il est important de savoir que sur du long terme, un enfant qui n’a pas intégré des limites suffisamment structurantes et qui n’a pas pu apprendre à accepter la frustration, peut développer des symptômes invalidants comme des difficultés d’apprentissage ou de socialisation, des problèmes de comportement ou encore, des retards du développement.
Règles et apprentissage
Il existe plusieurs types de règles, chacune à sa fonction. L’ensemble des règles ci-dessous permettent à l’enfant de vivre en sécurité, de grandir en développant ses compétences et de s’ouvrir aux autres.
Les règles qui assurent la protection de l’enfant : Il y a des règles qui protègent l’intégrité physique de l’enfant (ex : « tu donnes la main quand on traverse la rue », « tu te tiens à la rampe dans les escaliers »)
Les règles qui répondent aux besoins vitaux : L’enfant a besoin d’être protégé, nourri, éduqué, soigné et aimé. L’enfant a également besoin de pouvoir s’attacher à ses parents et de sentir que ceux-ci l’aiment. Il a besoin de savoir qu’il a sa place dans la famille. Il a besoin que ses parents l’encouragent à découvrir de nouvelles choses. Enfin, il a besoin non seulement que ses parents le félicitent lorsqu’il réalise ses exploits mais aussi qu’ils interviennent lorsqu’il fait des bêtises.
Les règles qui permettent la vie en société : les règles de vie en société assurent le respect des autres et permettent la vie en communauté et les relations aux autres. Ces règles servent à apprendre comment faire pour vivre ensemble. Même s’il n’est pas toujours facile et agréable pour les parents de rappeler les règles, c’est le meilleur moyen pour apprendre à leur enfant à vivre en société.
Les règles de politesse qui sont des signes de respect entre individu.
Il existe par ailleurs, une hiérarchie dans les règles. Celles qui sont par définition indiscutables comme les règles garantes de la sécurité physique et psychologique de l’enfant et des autres. Tout le monde y est soumis, l’adulte aussi. Les règles plus relatives qui sont propres à chaque famille, à chaque situation. Elles reflètent les valeurs, les façon de faire, la culture de la famille. Il va évidemment de soit qu’il est essentiel d’adapter les règles à l’âge et aux besoins de l’enfant et qu’il convient toujours de se demander si ce que l’on demande à son enfant lui est adapté ?
Le respect de la règle est un apprentissage au long cours. Avant l’âge de 3 ans, l’enfant ne comprend pas vraiment le sens des règles : pourquoi certaines choses sont permises et d’autres interdites. C’est parce qu’il se sent protégé et aimé par ses parents (ou des adultes proches de lui) qu’il les respecte. Retenons par ailleurs que l’enfant apprend en faisant des expériences, c’est pourquoi il tente de tester les limites : sont-elles vraiment importantes ? Pourquoi ? Les autres enfants les respectent-elles ? Les adultes les respectent-elles ? Il faudra lui répéter très très souvent chaque règle et lui en donner le sens. Ce n’est pas parce qu’un enfant connaît une règle qu’il va nécessairemment l’appliquer. Progressivement, il intègrera le pourquoi des règles et pourra les faire siennes. Il les adoptera même en l’absence de l’adulte car il en comprendra l’utilité, mais il faudra beaucoup de temps et s’armer de patience. La tâche de poser des limites est un travail quotidien, il faut tenir la distance, maintenir le cap chaque jour, ce n’est pas simple !
Sanction, punition ou conséquence ?
Source : C. Goldman (2020)
Il nous semble essentiel qu’un enfant puisse apprendre que l’absence du respect d’une règle entraine des conséquences. Il est certes important d’expliquer et de répéter la règle à un enfant mais à un moment donné, il importe d’agir. Appliquer la sanction (ou la conséquence) annoncée donne un fondement à nos paroles. Ce n’est pas sa personne qui est sanctionnée, mais son acte ou son comportement.
Il arrive très régulièrement que soit confondu « éducation » et « parole ». “Nous lui avons répété mille fois de ne pas jeter ses jouets à travers la pièce lorsqu’il est fâché et pourtant, il continue !“. Expliquer le pourquoi d’un interdit et son importance est en effet fondamental pour un enfant mais comment celui-ci pourrait-il croire à cette importance s’il peut, de façon répétitive, transgresser la règle sans que rien ne se passe ? Sans conséquences ? Marquer par une punition la gravité de la transgression c’est, pour les parents, mettre leurs paroles en accord avec leurs actes. Ce n’est pas se montrer maltraitant comme peut le laisser penser notre société mais être cohérent dans sa parentalité. Il y a bien entendu des balises à respecter :
L’enfant doit savoir quelle conséquence sera appliquée si la règle n’est pas respectée.
La conséquence doit venir rapidement après l’acte, sinon, elle perd de son sens auprès de l’enfant.
Elle doit être limitée dans le temps (après la conséquence le dialogue se rétablit).
Elle doit être adaptée aux capacités de l’enfant, à son développement, à son âge.
Elle doit être juste, tenir compte des circonstances atténuantes ou aggravantes.
En aucun cas la conséquence d’un non respect de règle ne doit porter atteinte à l’intégrité corporelle de l’enfant.
Elle ne doit jamais l’humilier ni être une vengeance (intégrité psychique).
On peut être en ferme tout en restant chaleureux dans la relation avec l’enfant.
Conclusion
Dès sa naissance, l’enfant abesoin d’un cadre et de limites autant que de liberté et d’autonomie. Cette réalité de limites et de frustrations se prolonge tout au long de la vie. Elle s’impose entre autres afin de réguler besoins, désirs, réalités, etc. composantes inhérentes à la condition humaine. Aider l’enfant à grandir est un rôle complexe qui renvoie tous les parents à des sentiments contradictoires : d’un côté, le désir de préserver leur tout-petit, de l’autre, l’envie qu’il acquiert son autonomie au plus vite.
L’enfant explore le monde qui l’entoure, d’abord dans le cocon familial, puis progressivement en dehors de la famille. Dans cette exploration, dans ces découvertes, il sera confronté à la réalité. L’éduquer, c’est lui donner un cadre sécurisant à l’intérieur duquel il est intéressant de grandir, même si cela comporte la frustration de certains désirs. Nous espérons que vous êtes maintenant convaincus que le manque et la frustration, permettent à l’enfant de grandir, d’apprendre et de se construire.
Enfin, dans notre société actuellement, désirs et besoins ont tendance à se confondre de plus en plus ; situation qui n’aide pas les parents dans leur tâche éducative. Notre société prône la consommation comme gage de bonheur absolu et cela nous fait oublier que, pour se construire, l’enfant doit consentir à renoncer, qu’il s’agit là d’un impératif de son fonctionnement psychique.
Zoé Campus
Psychologue clinicienne ~ Thérapeute du développement ~ Thérapeute par le Jeu et la Créativité